Grenoble – Compte rendu du débat sur le Lyon-Turin du 8 octobre à la Maison des Assos

Lundi 8 octobre à la maison des associations, avait lieu un débat sur la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (« TAV » en italien). Intitulé « le Lyon-Turin – preuves en main », il était organisé par l’association d’italophones grenoblois « onda italia ».

Une soixantaine de personnes est dans la salle.

A l’entrée, un tract est diffusé, intitulé « la cause du Val de Suse est notre cause » (à lire sur indymediaGrenoble, dans le post du même nom, 9/10, Libeludd). Il montre le lien entre le désastreux Lyon-Turin et le délirant projet de Sillon Alpin lequel concerne directement Grenoble. Surtout, il critique la possibilité d’un débat d’experts « courtois » alors qu’à 3h d’ici en Val de Susa, le chantier du TAV est protégé par des soldats et des barbelés militaires, des militant.e.s emprisonné.e.s, et des centaines d’opposant.e.s tout simplement interdit.e.s de circulation dans leur propre vallée. Alors que le budget est voté et le chantier officiellement lancé, l’heure n’est plus au débat « démocratique » (qui n’a jamais eu lieu), mais à la lutte.

Un des animateurs de la soirée pose l’ambiance : « à onda italia nous ne sommes ni pour ni contre, nous voulons simplement que le débat ait lieu».

Et les invité.e.s sont donc, dans la grande tradition de l’illusion paritaire démocratique : deux « pour » (Jacques Chiron, représentant la ville de Grenoble dans le lobby pro LyonTurin « la Transalpine », et Marc Lavédrine, délégué général de la Transalpine), et deux « contre » (Daniel Ibanez de la Coordination des associations contre le Lyon-Turin, et deux représentant.e.s italien.ne.s du comité NoTav-Europe). Deux communicants professionnels qui ont depuis dix ans toutes les tribunes qu’ils souhaitent, face à deux représentants d’une lutte durement réprimée (en italie) et invisibilisée.

Chiron prend la parole le premier, après des applaudissements prolongés de la salle, l’invitant à conclure avant d’avoir commencé. Lorsque des personnes répondent avec colère, depuis la salle, à ses premiers mensonges, elles suscitent l’indignation des organisateurs et de quelques membres du public : « laissez-le terminer, vous n’êtes pas démocratique, vous parlerez après ! ». Classique, mais il est plutôt décevant que ces injonctions viennent aussi de Prieri, l’intervenant de Notav-Europe…

Les interventions de Chiron puis de Lavédrine sont l’habituel tissu de mensonges : « c’est avant tout un projet de fret, ça ne coutera que X milliards, ça fera X emplois », « c’est pour enfin donner sa chance au rail en france». Omission totale des conséquences catastrophiques et irréversibles du chantier, et des capacités de la ligne existante) et d’invocation religieuse du mythe de la croissance (« c’est la crise ! » « si on ne le fait pas alors on serait ceux qui ne feront rien », « c’est physique », « on est obligés de», « il faut »), avec une habile évocation des hordes de camionneurs « ukrainiens, tchèques, hongrois, polonais…. euh… slovaques ! » qui vont déferler sur l’Europe de l’Ouest car « eux aussi veulent se développer, avoir le même niveau de vie que nous, c’est bien normal ! ».

La parole est ensuite à l’intervenante de NoTav-europe, qui rappelle brièvement la répression depuis 2005 en Val de Susa, et décrit les moyens de lutte du mouvement Notav (organisation en comités locaux, presidios permanents pour empêcher physiquement le chantier, lutte conviviale et populaire, démocratie « de base ») ; son collègue, après avoir déclaré que le mouvement Notav « ne voulait pas laisser les politiciens dans leur solitude », enchaîne avec un discours confus sur les grands projets inutiles et les droits sociaux, qui endort la salle. Puis c’est au tour de Daniel Ibanez, qui se propose de contrer le discours pro Lyon-Turin « avec des preuves non approximatives », et dénonce donc avec moult courbes et tableaux l’inutilité économique du projet, les mensonges sur les coûts annoncés, les collusions d’intérêt des promoteurs (par exemple M. Rolin qui cumule les responsabilités à la fois dans le rail et la route) et de ceux qui ont mené l’ «enquête»d’utilité publique, ainsi que le vrai responsable de la pollution des vallées, à savoir les transports individuels de proximité en voiture. Dans tout ça, depuis une heure on n’a toujours pas parlé ni de politique, ni de modèle de société, ni des nuisances concrètes du projet : déblais colossaux, amiante et uranium, assèchement des sources…

C’est désormais le moment des rituelles « questions aux experts ». Remarques plus que questions, toutes hostiles au projet et faisant plus de place aux vrais enjeux : que transporte-t-on dans ces foutus containers, pourquoi, pour qui, pour combien de temps ? Jusqu’où est-on prêts à aller pour « donner du boulot » aux gens ?

La tension remonte brusquement lorsqu’un élu des Verts au conseil régional est attaqué par quelqu’un du public, sur le « greenwashing » du Lyon-Turin en projet fret à partir de 2005-2006, par les élus Verts de l’époque. Puis Chiron et Lavédrine ont du mal à donner leurs « réponses », tant ils sont interrompus par les interventions fusant depuis la salle, et les invitant une nouvelle fois à partir. Un des opposants s’approche du micro de la tribune pour prendre la parole, les organisateurs furieux l’en empêchent physiquement. L’ambiance est chaude. M. Prieri (notav-europe), apparemment désireux de « soulager la salle », ré-endort tout le monde avec des histoires de Lune et de Sibérie, pour la plus grande satisafaction de l’animateur qui le remercie pour « cette intervention légère », et des deux compères pro-Tav qu’il n’attaque absolument pas, et qui peuvent tranquillement se reposer.

Le deuxième round de « questions du public » est à nouveau majoritairement hostile au Lyon-Turin et au Sillon Alpin. Une petite phrase pour la route : « Si vous tenez tellement à dépenser 8 milliards d’euros pour occuper des gens qui, sinon, viendraient vous pendre, donnez-leur directement, au lieu de leur faire creuser des trous. »

Une provocation d’un des animateurs (« tous ces braves gens qui crient leur opposition ce soir, que faites-vous pour lutter ici en france, est-ce que vous êtes au moins déjà allés en Val de Susa ? ») est l’occasion de sortir un drapeau NO TAV, et de rappeler l’existence et l’action du collectif NoTav-savoie depuis un an. Entre autres : organisation de réunions publiques le long du tracé, de rassemblements et d’une manifestation à Chambéry en juin dernier, blog et diffusion de tracts…

La lutte continue de ce côté-ci des Alpes !

Infos et actualités sur www.no-tav-savoie.org contact : notav-savoie@voila.fr

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